Libre, enfin. Après dix-huit mois de prison, Théo est libéré pour bonne conduite. Mais à peine sorti, le voilà de nouveau en mauvaise posture, après avoir rendu visite à son frère, qu'il n'a plus le droit d'approcher : il y a deux ans, il lui a brisé la colonne vertébrale et l'a laissé pour mort après avoir découvert la liaison que sa propre femme entretenait avec lui. Persuadé d'avoir tous les policiers du pays à ses trousses, il se réfugie à la campagne, dans une chambre d'hôtes tenue par une vieille femme.

 

Pendant quelque temps, il jouit du simple plaisir d'être libre, parcourant les sentiers et les forêts, seul, libéré de toute contrainte. Il redécouvre les petits bonheurs de l'existence, une belle promenade, un bon feu, un bon repas, une compagnie agréable.

 

Mais un beau jour, son hôtesse l'envoie dans un vrai traquenard. Théo n'a vraiment rien d'une victime, et pourtant, du jour au lendemain, il se retrouve kidnappé et séquestré par deux frères dégénérés qui l'utilisent comme esclave et le traitent comme un chien : le voilà privé d'eau et de nourriture, battu et n'ayant pour dormir qu'une une vilaine paillasse au fond d'une cave humide et malodorante.

 

Dans son malheur, il n'est pas seul : il rencontre Luc, lui aussi esclave des deux vieux fous, tellement maigre, blessé et affaibli que ses jours paraissent comptés. Devant son désespoir, Théo se fait une promesse : il a survécu à la prison, aux privations, aux bagarres, aux coups sournois des codétenus et des matons, alors il échappera, coûte que coûte, à cet enfer. Mais à quel prix ?

 

 

Consacré dès sa sortie comme "le nouveau chef-d'œuvre du polar français", Des nœuds d'acier se veut au croisement de Misery et de Délivrance : un thriller à base de séquestration et de divers sévices, mais par des dégénérés, s'il vous plaît.

 

L'idée de départ est plutôt intéressante, bien qu'elle ne brille pas par son originalité : des romans sur le même thème, il en existe déjà beaucoup. Ici, Sandrine Collette pense apporter sa touche d'originalité en installant son intrigue à la campagne, dans un coin perdu volontairement anonyme (afin de toucher à l'universel, sans doute, ambiance "cela aurait pu arriver n'importe où"... Oui, comme n'importe quel fait divers, donc), et en jouant sur le caractère de ses personnages : d'un côté un ancien taulard quelque peu rongé par le remords d'avoir transformé son frère en légume (oui, mais ne vous inquiétez pas, il l'avait tout de même bien mérité, ce salaud qui avait tout pour lui et lui avait même piqué sa femme), et de l'autre deux frères à moitié fous, qui vivent reclus, ne pensent qu'à se soûler à la gnôle maison et à forniquer avec leur propre sœur, elle même octogénaire, lorsqu'elle leur paye une petite visite.

 

Le problème, c'est qu'avec ce parti pris, l'auteur tombe rapidement dans la surenchère, en particulier avec les descriptions des tortures endurées par le héros, et surtout dans la répétition : le récit finit fatalement par tourner en rond, lorsque Théo évoque inlassablement ses journées de labeur, ses pensées, ses terreurs, ses espoirs de plus en plus minces de pouvoir s'échapper un jour. Le style, s'il avait été un tant soit peu travaillé, aurait pu rendre ces chapitres redondants plus intéressants, mais Sandrine Collette a visiblement appris à écrire avec Karine Giébel, autre prétendue "reine" du polar contemporain : des phrases courtes, hachées, sans souffle, des effets faciles, des images convenues.

 

Ajoutons que, malgré les efforts de l'auteur pour rendre son héros plus attachant, notamment par le biais de ses souvenirs d'enfance ou de ses pensées pour la femme qu'il aime (grande absente du récit, étant donné que par un mystérieux "hasard" qui tombe bien, il a oublié de la prévenir qu'il était sorti de prison...), Théo reste un personnage plutôt antipathique et froid, animé par la haine et la violence. Difficile donc de s'apitoyer sur son sort et de compatir à ses souffrances, ce qui enlève tout de même pas mal d'intérêt au roman.

 

Loin de conclure ce polar en apothéose, comme on l'aurait souhaité, le dénouement laisse le lecteur sur sa faim : l'issue du roman est en effet assez prévisible, et on attend longtemps une chute qui ne vient pas, malgré la pirouette finale de l'auteur, qui s'amuse à faire de son héros un nouveau double de ce frère infirme qu'il hait de tout son être.

 

En bref, un polar qui a reçu, de la part de la critique et du public, des éloges surprenants : construit sur une idée qui manque tout de même d'originalité, il traîne en longueur (un comble pour un roman de 260 pages) et parvient tout juste à emmener son lecteur jusqu'au dénouement, qui arrive comme un cheveu sur la soupe, le tout servi par un style sans génie, qui se complaît dans des descriptions glauques et des scènes sordides. 1.5 étoile

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